ON SE SOUVIENT DE LUI ET DE SON MAGNIFIQUE BORSALINO AUX JO DE PÉKIN EN 2008. TONY ESTANGUET ÉTAIT PORTE-DRAPEAU DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE. KAYAKISTE SPÉCIALISTE DU CANOË MONOPLACE SLALOM, TROIS FOIS CHAMPION DU MONDE ET TROIS FOIS CHAMPION OLYMPIQUE. SPORTIF DE HAUT NIVEAU PENDANT 12 ANS, TONY ESTANGUET EST AUJOURD’HUI LE PRÉSIDENT DU COMITÉ D’ORGANISATION DES JEUX OLYMPIQUES DE PARIS 2024. « MONSIEUR J.O. » SE CONFIE À L’ACCÉLÉRATEUR POUR NOUS PARLER DE SA CARRIÈRE ET DE SES NOUVEAUX PROJETS.

Quels points communs les sportifs de haut niveau ont-ils avec les chefs d’entreprise ?

Être athlète de haut niveau, c’est s’imposer une rigueur et un goût pour l’excellence qui vont vous guider tout au long de votre carrière. Le succès est à ce prix, et c’est souvent dans les détails que la différence se fait. C’est également le cas lorsque l’on est chef d’entreprise et que l’on dirige une équipe. On doit montrer l’exemple et insuffler le goût du travail bien fait. Il faut savoir où l’on veut aller et partager largement cette vision pour embarquer ses équipes. Comme athlète hier et aujourd’hui comme dirigeant, je reste guidé par la même envie de rassembler. Notre plus beau défi avec Paris 2024 est d’insuffler cet état d’esprit positif et fédérateur auprès des membres de l’équipe, des volontaires, des athlètes, de nos partenaires et de tous les Français afin qu’ils participent, eux aussi, à ce grand projet.

Quelles aptitudes avez-vous développées pendant votre carrière sportive qui peuvent inspirer des chefs d’entreprise ?

Je crois qu’on apprend surtout à se relever après une chute… et à se remettre en question en permanence pour avancer toujours plus loin.

Vous avez été nommé président du Comité Paris 2024 pour 8 ans. Tourner la page du sport de haut niveau a-t-il été difficile ? Comment avez-vous abordé ce tournant de vie ?

Je m’y étais préparé. Pour autant, je ne vis pas cette nouvelle étape de ma vie comme une rupture. Après ma carrière d’athlète, j’ai notamment intégré le Comité International Olympique. Mon histoire a toujours été liée à l’Olympisme et à ses valeurs. Organiser les Jeux à Paris est une fierté supplémentaire. Je n’ai pas non plus abandonné le sport, je vous rassure. Aujourd’hui, c’est en famille, avec mes enfants, que j’aime le pratiquer.

Quelles difficultés concrètes les sportifs rencontrent-ils une fois qu’ils quittent le monde du sport de compétition pour la vie « normale » ?

On peut parfois mettre un peu de temps à trouver un projet qui nous passionne autant que le faisait notre sport, avec autant de challenges et d’émotions fortes. Mais une fois trouvé ce nouveau défi, un athlète de haut niveau peut apporter énormément à un collectif : le sens de l’effort, le goût du collectif, la capacité à être prêt le jour J. C’est la raison pour laquelle les athlètes sont au cœur de l’organisation de Paris 2024. Je suis déjà entouré d’Olympiens et d’anciens athlètes de haut niveau (Guy Drut, Thierry Rey, Jean-Philippe Gatien, Étienne Thobois, Michaël Aloïsio, Bruno Marie-Rose, Emmeline Ndongue, Sébastien Rouault…), sans compter les athlètes membres du Comité des athlètes, présidé par Martin Fourcade, ou de notre Conseil d’administration, où siègent notamment Marie-Josée Pérec, Sarah Ourahmoune, Marie-Amélie Le Fur …

Quelle est votre mission exacte pour ces JO ?

Ma mission, en tant que Président de Paris 2024, est de conduire l’équipe qui va organiser les Jeux en France, dans les meilleures conditions possibles pour les athlètes et pour les spectateurs. Mais notre ambition est bien plus grande : marquer l’histoire de notre pays et du Mouvement Olympique. Ces Jeux doivent être spectaculaires, créatifs, innovants. Ils doivent aussi devenir une référence en ouvrant un nouveau chapitre pour des Jeux plus utiles, plus sobres et plus responsables. C’est un formidable défi collectif qui s’offre à nous et mon rôle consistera à engager et rassembler tous les acteurs qui souhaitent apporter leur énergie et contribution à cette aventure : le monde sportif, associatif, les entreprises, les élus, les partenaires sociaux, tous les Français.

Comment vous êtes-vous préparé à ce nouveau challenge, si différent de votre vie d’avant ? Budget à gérer, relations avec la presse, le monde politique … ?

Comme pour une grande compétition sportive : en travaillant et en m’entourant ! Les trois années de la candidature ont été formatrices. Nous avons travaillé jour et nuit pour construire ce projet. J’ai également eu la chance d’être accompagné par des personnalités comme Bernard Lapasset et Guy Drut qui détiennent tous deux une grande expérience de l’organisation d’événements sportifs.

En quoi ces jeux seront-ils différents des précédents ? C’est quoi « un projet en rupture » ?

Notre ambition est que les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 soient spectaculaires mais aussi utiles. Les Jeux ne peuvent pas être un prétexte à des dépenses non maîtrisées et à des investissements qui ne répondent pas au besoin des populations. Ce projet devra être en rupture par rapport à ce qui a pu se faire par le passé. Nous avons la chance de partager cette ambition avec le Comité International Olympique et le Comité International Paralympique qui travaillent activement depuis plusieurs années à un nouveau modèle pour les Jeux. Sur les équipements par exemple, les deux tiers des infrastructures qui accueilleront les Jeux de Paris 2024 existent déjà. Un seul nouvel équipement sportif sera construit, le Centre Aquatique situé à Saint-Denis, parce qu’il répond à un besoin territorial réel : 1 enfant sur 2 de la Seine-Saint-Denis ne sait pas nager à son arrivée en sixième. Pour le reste, nous avons fait le choix d’utiliser des équipements temporaires. Ces équipements, financés à 100 % par des ressources privées (billetterie, programme marketing et financement du Comité International Olympique) seront ensuite réutilisés pour un autre usage. C’est par exemple le cas des piscines d’entraînement pour les athlètes qui seront ensuite réimplantées un peu partout en Seine-Saint-Denis pour le bénéfice des habitants. Un projet en rupture, c’est un projet où chaque euro investi est utile à la population. ●