Des mouches pour développer une industrie zéro déchet ? C’est le pari lancé par Damien Sabatier, docteur en agronomie et globe trotteur. Avec Biomimetic, il a développé une solution de traitement des écarts de production agricoles et co-produits issus de l’industrie agroalimentaire : les mouches transforment les biodéchets en engrais et produisent des larves, sources de protéines et d’huiles, le tout directement chez les clients.

 

Tout a débuté en 2013 en Afrique du Sud, où Damien Sabatier effectue une mission d’expertise. Le jeune docteur y découvre l’entomo-conversion, « un processus naturel qui utilise des insectes recycleurs : j’ai été frappé par l’intelligence du procédé, par ailleurs très artisanal puisqu’il suffisait d’un bac en béton où les mouches venaient spontanément. J’ai vu les hommes récupérer les asticots, et s’en servir pour nourrir les poissons d’élevage de l’étang voisin. Ce modèle m’a convaincu : c’était la solution de demain pour valoriser nos déchets organiques ». Un modèle qui permet de compléter avantageusement les procédés actuels de traitement des biodéchets : la méthanisation, assez peu répandue, et le compostage qui concerne 90 % des flux valorisés. « Or, ces procédés génèrent des externalités et supposent des investissements assez lourds », pointe Damien Sabatier.

 
D’un élevage de mouches artisanal…

Damien Sabatier ramène donc l’idée en France, avec l’objectif « d’inventer un modèle économique basé sur le vivant, et une activité de service rentable ». Il réalise ses premiers essais dans son garage, afin de lancer un procédé de domestication des insectes sur différents fruits et légumes. Sa première lignée de Mouches Soldats naît artisanalement, « mais pour passer à quelque chose de reproductible, il a fallu beaucoup de travail : maîtriser le vivant, l’adapter à tous types de supports organiques, créer un parcours technique de production, etc. ». Une expertise revendiquée par Damien Sabatier et son entreprise BioMiMetiC : « aujourd’hui, nous sommes capables de reproduire nos lignées en grandes quantités afin de les intégrer dans des processus de traitement des biodéchets à grande échelle ». Avec un avantage considérable : le gain de temps. « Le processus de valorisation ne prend qu’une semaine : l’insecte a conclu son cycle vital et les larves ont été engraissées. » Toute la matière organique est alors transformée et deux produits sont récupérés en sortie de processus : du fumier issu des déjections des insectes, et des larves d’insectes engraissées, utilisées dans l’alimentation animale par exemple. « La matière entrante est ainsi valorisée à 100 % ! »

 
… à une solution industrielle écoresponsable et vertueuse

BioMiMetiC est en phase de développement pour implanter et adapter son procédé chez les agriculteurs et les industriels de l’agroalimentaire. « Nous proposons un autre modèle que celui des grands centres de traitements qui déplacent les matières à recycler. Avec notre procédé, nous allons au plus près des producteurs de biodéchets, très atomisés sur le territoire (agriculteurs, industries agroalimentaires, particuliers…). Nous avons donc conçu des structures de traitement locales, adaptables à l’échelle des gisements, installées directement chez le client. » Grâce à cette proximité, BioMiMetiC agit pour l’activité économique locale tout en limitant le transport des matières : « on crée de la valeur sur les territoires, de l’emploi, et on réintroduit le vivant localement pour fertiliser, alimenter les systèmes de production qui nous nourrissent ».